Villa Laurens
Cette belle demeure appartient à M. Laurens qui a l’intention d’en faire sa résidence permanente.
Cette construction s’élèvera en bordure du boulevard Narbonne dans cet immense quartier nouveau, peuplé de villas et d’H. B. M. qui a reçu, à juste titre, le nom de « Beauséjour », et qui s’étend depuis la limite périphérique de Bône jusqu’au lieu dit SaintCloud-Ies-Plages, au bord de la mer.
Le projet en a été confié à MM. Naz et Buttigieg, architectes, qui ont déjà exécuté sur les lieux de cette même agglomération une soixantaine de villas diverses faisant partie des programmes successifs d’H. B. M. du Patrimoine Coopératif Bônois, et à qui nous devons la décoration des Salles de FHôtel-de-Ville de Bône, projet que nous avons publié dans le numéro de novembre dernier.
Le problème consistait à placer sur un terrain exigu une construction qui devait conserver le caractèrie général d’une villa et devait offrir une résidence confortable pour une famille composée de 3 personnes.
Le sous-sol est aménagé en garage assez vaste pour permettre le logement de deux voitures automobiles et l’installation d’une cave à vins, d’une buanderie et d’un débarras supplémentaire.
Un escalier de service assure la communication directe du sous-sol avec la cuisine, située au rez-dechaussée.
Celui-ci, dans sa majeure partie, comporte un local de dimensions suffisantes disposé en trois divisions, de volumes différents, communiquant entre elles et dont l’ensemble constitue une seule et vaste pièce : le livingroom « la pièce où l’on se tient ». On y accède par un vestibule qui donne directement dans le hall-salon d’où l’on passe au bureau et à la salle à manger. Ces trois
divisions ne sont séparées que par un simple pilier supportant un plateau massif de mocassar pouvant servir à la fois de desserte, de table à thé et de sellette. Ce meuble original réalise donc dans sa simplicité le maximum d’utilité dans le minimum d’encombrement. C’est une trouvaille qui procède, en somme, de l’esprit nouveau en architecture dont MM. Naz et Buttgieg se sont, semble-t-il, inspirés pour la réalisation de cette villa moderne.
A l’angle Sud, se trouve la cuisine avec une issue directe sur l’extérieur. Elle est équipée d’une façon complète, selon les données techniques actuelles. La communication avec la salle à manger se fait par l’office, garni de placards judicieusement étudiés pour la commodité.
De la salle à manger, et devant celle-ci, on accède à une petite terrasse, dominant le boulevard, garnie d’une fontaine et de bacs à fleurs.
Du hall, part un large escalier de marbre, dont la
rampe est en fer forgé. Il aboutit à l’étage, agencé en 3 chambres, salles de bains et placards d’angle.
L’échiffre de l’escalier a été disposé pour recevoir les encastrements du radiateur ainsi que, éventuellement, des objets d’arts et des livres.
Par une deuxième volée d’escaliers, on arrive au toit en terrasse qu’abrite contre l’intempérie une large dalle de béton armé. Ce dispositif, outre qu’il constitue un excellent moyen de préservation pour la construction elle-même donne à celle-ci une silhouette caractéristique.
L’ensemble est traité dans une note très simple. La nudité des surfaces verticales, l’absence de toute « verrue » soi-disant décorative, l’espèce de dynamisme qui se dégage du jeu des volumes, la liberté qui a présidé à la forme et à l’emplacement des ouvertures, enfin, et par dessus tout, l’ingéniosité du plan uniquement inspiré par le souci de créer une habitation « habitable » au sens où nous l’entendons aujourd’hui, font de cette
construction un type de maison appelé, croyons-nous, à être reproduit dans nos régions. C’est, en effet, à des contributions comme celle-ci que nous devront peutêtre de voir se réaliser un jour une architecture « méditerranéenne » selon l’expression de notre collaborateur M. J. Cottereau.
Ajoutons que les intérieurs, bien que traités dans une note très sobre, en harmonie avec l’aspect extérieur de l’édifice, seront réalisés avec beaucoup de soin et d’élégance en ce qui concerne le choix des matériaux. Les murs seront revêtus de peintures épaisses, chiquetées avec frises de « sgraffites » et frottis or ou argent.
Le gros œuvre est constitué par une ossature de béton armé avec remplissage en briques 12 trous (nouveaux produits livrés par la briquetterie Falzon et Baghinomini). L’exécution de ces travaux a été confiée à la firme Aletti et Denoucin, importante entreprise locale.
La maison T. A. M. de Tunis apporte sa collaboration aux installations sanitaires et à celle du chauffage central.
Cette construction dont les travaux actuellement en cours seront terminés dans quelques jours (courant janvier 1932) aura coûté environ 200.000 francs.
Les Chantiers nord-africains, Date d’édition : 1932-01, 1933-01